Les Côte-d’Oriens, qui ne l’avaient pas
oublié, ont retrouvé la semaine dernière Cyril Huvé, un pianiste hors du
commun, hors normes, invité par Musique au Chambertin du côté de Gevrey.
Retrouvailles, car le pianiste a sévi un temps au CNR de Dijon, a surtout lancé
avec succès les fameuses Rencontres musicales d’Arc-et-Senans : cet élève de
Claudio Arrau s’est ensuite affûté en enseignant au CNSM de Paris et enchanté
l’Europe de ses récitals où Chopin et Debussy côtoient Satie ou Liszt.
Le piano de Stephen Paulello
Cyril Huvé vient de sortir un nouveau
disque et c’est un événement. Car voici un récital sur un piano comme on n’en
encore jamais connu, un piano à 102 notes conçu par Stephen Paulello qui a
travaillé vingt ans pour réaliser ce piano auquel il faudrait trouver un autre
nom, un piano qui n’a plus rien à voir avec ce qu’on connaît du piano ! “Plus
rien n’est fait comme chez Steinway” dit-il volontiers, lui qui a longtemps
conseillé la grande marque et fabriqué des cordes pour Yamaha.
Cent deux notes sur des cordes parallèles
dotées d’un agrafe qui transmet la vibration de la corde à la table d’harmonie
sans appuyer dessus ! Alors là, le toucher magique de Cyril Huvé fait évidemment
merveille et l’émotion offerte sous les Brouillards debussystes ou la poésie
nocturne de Scriabine est d’une intensité bouleversante.
Modernité inattendue
Même la Sonate en si
mineur de Liszt, monument métaphysique, trouve ici une actualité étonnante,
disant tout des doutes du monde actuel. Cela va jusqu’à la Cathédrale engloutie
qui nous laisse penser, sous les doigts magiques de Cyril Huvé, que Debussy a
vécu le récent incendie de Notre-Dame de Paris.
Epoustouflant. On n’a qu’une envie, celle
de se rendre dans la Grange aux pianos, à Chassignolles près de Nohant, où
Cyril et Céline présentent leurs 24 pianos lors de récitals qu’y donnent les
plus grands pianistes contemporains. Et comme Chopin n’est pas loin, on rêve,
on ne respire plus que la beauté.
Michel HUVET
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