lundi 16 novembre 2020

LES TROP DISCRETS ADIEUX DU QUATUOR MANFRED


Annus terribilis que celle que nous vivons. Année horrible qui a tout fait basculer dans notre monde. Et dans ce tunnel du confinement, alors que chacun est privé des autres, que chacun ne peut plus partager avec les autres les visions d’étoiles que seul offrent le concert ou l’art vivant, voici que, pudiquement, le Quatuor Manfred nous annonce son retrait définitif.

Tremblement de la terre culturelle. Séisme fractal de belle ampleur, dans une sorte de silence effroyable dans lequel est plongé ce monde, et Dijon d’abord. Oui, Dijon où ce quatuor mondialement primé (prix mondial à Bannf au Canada, prix européen à Genève) avait réussi à se fixer grâce à Jean-Louis Gand, alors directeur du conservatoire de Dijon, qui avait offert aux quatre artistes un poste de professeur.

Jouant dans les plus grands festivals, les quatre Manfred – qui ont certes dû changer trois fois d’altiste – n’ont cessé d’aborder les plus variés des répertoires, inventant Musiques en Voûtes chaque mois de septembre dans les quatre départements de Bourgogne, donnant à Dijon des intégrales de Schubert ou Mozart, flirtant avec la musique de cabaret, de film ou de jazz, éblouissant les publics de leur virtuose sensibilité,…

Ceux qui vivaient mieux grâce à eux

Jamais on ne put un instant penser que tout cela s’arrêterait ainsi, au pire moment de la fringale musicale que chacun ressent en mélophile confiné. Marie Béreau, Luigi Vecchioni, Emmanuel Harratyk et Christian Wolff continueront certes d’enseigner et de former quelques successeurs mais cette page qui se tourne fait mal, très mal, à tous ceux qui – plus innombrables qu’on ne l’imagine – vivaient mieux grâce à eux.

Ils nous quittent par un communiqué d’une rare pudeur et d’une infinie délicatesse mais ils ne nous oteront pas de l’idée que le satanique covid a dû hâter leur décision, tant économiquement que musicalement.

Ils nous disent merci. ..

Mais ne devrions-nous pas nous mobiliser pour ne pas les laisser partir ainsi ?

Michel HUVET