Retour au pays pour un futur grand du
cinéma français : Arnaud Viard a mesuré l’autre soir au Darcy dijonnais
l’ampleur des relations qu’il a gardées avec sa ville natale et avec tous ceux
qui ont connu son grand chirurgien de père. C’est en effet dans le cadre des
Rencontres Cinématographiques dijonnaises qu’il est venu présenter, en
avant-première, son troisième film Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part.
Du vrai cinéma d’auteur ! Arnaud Viard nous
emmène à mi-chemin entre la tragédie grecque et l’autobiographie contemporaine
avec ce film captivant qui, – tiré d’un recueil de nouvelles d’Anna Gavalda
dont il ne reste que les quelques personnages dénichés par le réalisateur et
scénariste–, nous embarque dans une atmosphère familiale aussi étouffante que
banale. Une fratrie de quatre personnes, dont l’aîné (Jean-Paul Rouve) est
patriarcal, le puiné écrasé par le doute de soi, la soeur enseignante et
secrètement écrivaine, et la benjamine photographe en rupture de chiffre d’affaires.
Tourné à Dijon et Fixin
Le suicide de l’aîné va évidemment faire
exploser cette cellule fraternelle et c’est la magie d’Arnaud Viard de nous en
révéler les fissures, les contradictions, les métaphysiques errances. Tout cela
par un art cinématographique impressionnant : des gros plans qui disent “je”,
des atmosphères pluvieuses, une présence suggérée du monde alentour, des
non-dits que la musique de Clément Ducol fait résonner subtilement, et des
acteurs tous aussi justes les uns que les autres, tels Benjamin Lavernhe
(Comédie-Française), Alice Taglioni ou Elsa Zylberstein qui encadrent Jean-Paul
Rouve à la perfection.
Une fois embarqué dans ce drame, on est
captivé, surpris, bouche-bée. Et l’émotion nous étreint sans qu’on veuille
l’admettre. Bien sûr, on est à Dijon ou à Fixin et on sait que le réalisateur y
a des attaches qui sont comme des madeleines proustiennes. Alors, oui, il y a
des scènes médicales, hospitalières, qui fleurent bon les souvenirs mais ce
côté autobiographique enrichit le propos du film et renforce encore l’émotion
qui s’en dégage. On n’oubliera pas cette scène de “libération” de la soeur
ainée, qui s’ouvre à sa vérité en s’en allant danser sous la pluie dans un coin
de la cour du lycée Carnot...
Michel HUVET
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