dimanche 17 janvier 2016

AUDITORIUM DE DIJON : LE LIVRE DE JEAN-LOUIS ROY CENSURÉ


Jean-Louis Roy est, à Dijon, incontournable. Comme médecin, ce spécialiste a su développer une hypnothérapie digestive qui fut révolutionnaire. Comme mélomane, il a inventé Eurydice délivrée et présidé la regrettée ADAMA (Amis de l’Auditorium et de la Musique). Comme fils de Jules Roy, il s’est battu en vain pour qu’à Dijon on crée un jour Lieutenant Karl, un opéra dont son père était l’auteur du livret et Aubert Lemeland le compositeur.

Déceptions et espérances

C’est donc avec un peu de rage au ventre qu’il a publié divers écrits, notamment Le Maire, la Muse et l’Architecte (1), où c’est déjà la politique de la Ville et de l’Auditorium qui agitait ses nerfs. Voilà qu’il récidive aujourd’hui avec L’Auditorium de Dijon (2), sous-titré Bientôt vingt ans. Il n’aura pas su attendre 2018 et ces vingt ans pour vider autant d’admiration que de bile à propos de tout ce qui s’est passé depuis 1998 par, autour, avec et contre cette salle de concerts dijonnaise qui a bousculé la vie culturelle locale.

Avec une honnêteté intellectuelle sans défaut, Jean-Louis Roy n’épargne rien des difficultés, déceptions, espérances ou jubilations que la fréquentation de l’Auditorium lui aura infligé au long des dix-sept ans d’existence de lieu dont Mistslav Rostropovitch me souffla un jour qu’il était « un cadeau de Dieu ». Il m’avait dit ça en coulisses un soir à l’entracte de Lady Machebth de Smolensk, opéra de Chostakovitch qu’il dirigeait avec l’orchestre de Zurich.

Le livre du docteur Roy est à la fois un brulôt et une anthologie. On est fixé dès le début sur la joie du mélomane Roy devant l’Auditorium : « Avant l’Auditorium, il n’y avait rien ». Et pan ! L’incipit n’y va pas par quatre chemins. Rien. Cloués au pilori les sociétés de concerts et autres Camerata de Bourgogne, le Conservatoire et le théâtre de Dijon qui offrit opéra et opérettes de 1827 à 2001 avec fierté, obstination et parfois du génie. Donc rien. C’était dire la soif qui étanglait les mélomanes dijonnais qu’il représentait à la tête d’Eurydice délivrée, association de mélomanes qui suivit le projet des premiers plans à ses premières saisons.

Une "fatwa contre mon livre" ! 

Oui mais voilà, Euridice ne cachait rien, et révéla parfois « ce qu’on désirait cacher ». Elle fut marginalisée et dut finalement se saborder. Ce qui n’empêcha pas le docteur Roy de maintenir sa pression pour que se tissent enfin, entre l’Auditorium et le public, des liens durables et que celui-ci écoutât celui-là. Peine perdue apparemment : « Les directeurs successifs ont peu à peu évincé ce qui n’était pas eux ». Conclusion : L’Auditorium, devenu Opéra de Dijon, « n’est pas encore une maison d’opéra : sans troupe, sans vedette, sans orchestre, sans danseurs, sans salle de répétition ».

Le livre de Jean-Louis Roy raconte tout des dix-sept années de la vie de l’Auditorium. Citations à l’appui. Réflexions et interviews à la clef. Un petit bijou que Sylvie Bouissou ne manqua pas de placer dans les livres et disques qu’elle offre aux entractes. Las, la direction de l’Opéra décida d’interdire ce livre sur les étals de l’Auditorium. Une « fatwa contre mon livre » s’insurge Jean-Louis Roy.

Raison de plus pour le lire, non ?


Michel HUVET

(1) Editions l’Harmattan, 2004
(2) Editions l’Harmattan, 2015



4 commentaires:

  1. L'Opéra de Dijon n'a jamais répondu aux demandes de l'auteur qui désirait entrer en relation avec son photographe, Gilles Abegg, pour obtenir son autorisation d'utiliser des photos destinées à illustrer son livre. Comme ces clichés étaient déjà largement diffusés, et faciles à se procurer en ligne, l'auteur a pu croire qu'elles étaient finalement libres de droits. L'Opéra de Dijon est-il le vrai détenteur des droits ? A-t-il voulu exercer son droit pour se défendre à l'avance d'un livre dont il ne connaissait rien et dont il craignait un jugement défavorable ? Il n'en est rien, cet ouvrage couvre de compliments et la salle et son directeur ! Néanmoins, ce dernier tient à en interdire la commercialisation. Qui lui fera entendre raison ? Peut-être le photographe lui-même qui ne s'est pas associé à sa plainte.

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  2. Comment un journaliste digne de ce nom peut-il utiliser des termes de "censure" de "fatwa" sans vérifier l'opportunité de leur emploi ? L'auteur a, imprudemment, copié et cité, sans avoir sollicité l'accord de leurs auteurs des photographies et un texte (critique intégrale de "Wozzeck", six pages imprimées). Le droit à citation est encadré. L'éditeur, alerté, a cru bon suspendre la vente du livre dans l'attente du règlement du litige. Voilà les faits. Donc, un peu de mesure et d'impartialité seraient les bienvenus.Ceci étant, l'ouvrage, malgré ses parti pris et ses inexactitudes, est un document d'un réel intérêt.

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  3. Ce livre, interdit de commercialisation, ne pouvait rester ignoré. L'auteur, novice, a appris combien le respect des droits d'auteur pouvait conduire à laisser dans l'ombre ce qui, sans lui, serait ignoré! Ainsi les photos sanctionnées avaient paru partout, dans la presse et même dans le blog de Michel Huvet. Quant à l'analyse de Wozzeck par Eusebius, pourquoi la contrefaire plutôt que la citer in extenso tant elle reflétait la concordance de vue entre son auteur et le spectateur. C'était là faire œuvre de diffusion, c'était un hommage, pas une contrefaçon ni un vol de ce qui ne rapporte rien à l'auteur du livre. JL Roy a reconnu ses torts, il n'en reste pas moins persuadé que ce qu'il a écrit mérite d'être publié (vanité d'auteur !). Alors son éditeur a bien voulu republier son livre début 2017 sous un titre voisin (AUDITORIUM DE DIJON, Autopsie d'un mort-vivant) avec quelques modifications, ajouts ou suppressions (notamment les photos litigieuses et l'article cité d'Eusebius, et par l'auteur connu par son alias (Louis Finne a longtemps sévi dans la revue EURYDICE délivrée). Aux amateurs de le consulter (il est en bibliothèques) ou de l'acheter.

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  4. Cette nouvelle parution reste insupportable pour la direction de l'Opéra de Dijon, elle maintient l'interdiction faite à Sylvie Bouissou, la disquaire itinérante, d'afficher l'ouvrage sur son stand : "Sylvie Bouissou a une relation contractuelle avec l’Opéra de Dijon pour effectuer son activité de vente de livres et de CD au sein de l’établissement de l’Auditorium. Dans ce cadre, elle est missionnée pour vendre des produits culturels en lien avec les spectacles et les artistes qui se produisent à l’Opéra de Dijon, d’où son refus auprès de vous."
    Comme si ce livre ne traitait pas d'artistes et de spectacles présentés sur cette scène ! Décidément...

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