François Bourcier en scène (Photo La Dépèche) |
C’est un trou de verdure où chante un grand
espoir. C’est ainsi qu’à Missery, non loin de Précy-sous-Thil et de Saulieu, un
petit village sous Mont-Saint-Jean, aux bords du Morvan, c’est là qu’un soir de
septembre j’ai repris espoir dans l’homme.
Car ce monde de médiafolie aggravée où la
pensée est annihilée par une télé de sourds-muets ou de clowns sans génie, de
rumeurs plus que d’infos, de contre-vérités jamais démenties, de conso-penseurs
affligeants par leur bave de lèche-culs politico-verbeux, ce monde qui dérape
de partout, qui décroche de l’Histoire, ce monde, oui, je l’ai cru perdu.
Et voilà qu’un soir de septembre, dans une
grange morvandelle où l’on mijote des lasagnes roboratives, installé sur des
gradins improbables sous un toit de grange éventée – un lieu au beau nom de
Cité du Verbe – un comédien exceptionnel, véritable Frégoli, qui s’appelle François
Bourcier, endosse le costume de Hume, d’Aristote, du comte de Gobineau, des
savants fous du XIX° et autres théoriciens des races, et nous fait vivre la
lente construction de la pensée eugéniste qui a abouti au nazisme et à la
solution finale.
Ils ont fait un rêve
Tout d’un coup, quand ce spectacle hors du
commun s’achève sur le I’have a dream de Martin Luther-King, on s’ébroue
l’esprit et, en applaudissant la performance du comédien, on se surprend à ne
plus être comme on était une heure et demie plus tôt, on se surprend à penser
de nouveau, c’est un sentiment assez prodigieux.
Tout n’est donc pas achevé de la bêtise
humaine ? Non, puisque des gens comme Jean-Louis Mercuzot (qui a réalisé cette
grange-théâtre et se bat depuis cinq ans pour en faire un lieu culturel
d’excellence) et François Bourcier (qui accepte de quitter Paris ou Avignon
pour venir dans ce lieu improbable) sont bien vivants, bien décidés à poursuivre
leur travail de résistance.
Evidemment, côté élus, on se soucie de
Missery et de sa Cité du Verbe comme d’une guigne. Ce n’est pas étonnant.
Michel HUVET