Dans cette opération de destruction de
l’Orchestre Dijon-Bourgogne, les musiciens et leurs dirigeants ne doivent pas
se tromper de combat. Il ne leur sert à rien de dénigrer les représentations du
Ring d’octobre dernier en reprenant un article malhonnête et tendancieux d’un
pseudo-musicologue parisien. D’abord parce que ce serait nier la vérité
musicale de ce Ring : un superbe orchestre et une direction absolument géniale
de Daniel Kawka.
Tout est néanmoins parti de là, c’est
certain. Le piège tendu par la municipalité à l’ODB était bien dans ce Ring : "Vous le faites et la saison sera finie pour vous, vous n’aurez pas un sou de
plus". Refus de l’ODB et de ses dirigeants qui se retrouvent empêtrés dans leur
propre contradiction. La Ville a payé cher pour que le Ring ait lieu quand
même. Dont acte.
"Ambassadeur culturel" ?
L’autre aspect du malaise entre la Ville et
l’ODB est de nature politique, voire politicienne. Fondé sur l’ancienne
Camerata qu’avait fondée Thierry Caens quand il était encore pro-Bazin, l’ODB
récupérait la plupart des musiciens de l’Opéra dont celui-ci voulait se
débarrasser. Thierry Caens en fit les frais en se voyant éjecté de la
structure. Devenu depuis lors pro-Rebsamen et nommé "ambassadeur culturel" de
la Ville, il doit se sentir mal à l’aise devant ce qui arrive.
Affaire politicienne : la municipalité
Rebsamen n’a jamais eu que de la méfiance vis-à-vis des dirigeants de l’ODB :
les présidents successifs avaient un lourd passé d’opposants. Et son
administrateur venait de servir la soupe d’un célèbre homme de droite
chalonnais avant de retourner en apparence sa veste et venir quémander une
bonne place à Dijon quand Chalon était revenue à ses amours socialistes
anciennes. Tout cela faisait beaucoup aux yeux des élus dijonnais.
Pour faire plaisir au nouveau directeur de
l’Auditorium redevenu Opéra de Dijon, on vira même sans ménagement aussi bien
le choeur que le ballet du-dit Opéra. Il y eut bien un petit vent de révolte.
Puis, comme toujours, on s’en accommoda, la vie reprit son cours, le
conservatoire perdit de son influence puisque ses professeurs n’avaient presque
plus de quoi exercer leur art et que leurs élèves n’avaient plus aucune
perspective de vague emploi futur dans leur ville.
Par les Dijonnais
Pour les Dijonnais
Le processus arrive à son terme : l’ODB
n’aura duré que ce que durent les structures mal fagottées, l’espace d’une
illusion. À quoi s’ajoute, pour cette formation, un manque de politique claire
de sa diffusion musicale, de son espace de travail, de sa place dans la vie
culturelle elle-même. La Région n’y vit pas de quoi dépenser plus pour la
culture musicale, d’autant qu’elle réduisait sa voilure culturelle de plus de
10%. Et le Département regardait tout ça d’un oeil financièrement assez
indifférent.
On en est là. Les musiciens de l’ODB n’ont
plus que leurs yeux pour pleurer. Et le public ne veut pas se rendre compte du
coup fatal porté à la culture dans la capitale des ducs. La pétition lancée par
l’ODB pour que la Ville fasse machine arrière obtiendra-t-elle suffisamment de
signatures ? On voudrait l’espérer, ne serait-ce que pour qu’un vrai débat ait
lieu sur la place réelle que tient, depuis 1827 au moins, la musique
symphonique et opératique jouée avec les Dijonnais et pour les Dijonnais dans
la ville de Rameau.
Michel HUVET
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