Quand je suis à Paris, au risque permanent de me cogner aux passants ou aux poteaux électriques, j’aime avoir le nez en l’air. Oui, en l’air, car les plaques commémoratives sont toujours placées à des hauteurs invraisemblables, au milieu d’une façade ou au-dessus d’une porte cochère.
J’ai appris ainsi un nombre incalculable d’évenements géographiques que la grande Histoire ne dit pas, des faits d’habitation qui lui donnent une dimension tellement humaine. Je ne passe jamais, tout près de la coupole de l’institut et du pont des Arts, sur les bords de la Seine, sans lever les yeux au premier étage de cet immeuble ancien où l’on me dit qu’ici mourut Voltaire : quand on sait dans quel état physique se trouvait l’auteur d’Agesilas, et combien seul il se trouvait alors, on ne peut que frémir d’émotion. Merci à la plaque de le rappeler avec cette belle constance !
J’aime aussi avoir le nez en l’air à Dijon, la capitale des Ducs de Bourgogne. Mais là, c’est souvent décevant, je dois bien le reconnaître : les méfaits des vents et des pluies, les fientes de pigeons, l’érosion des matières n’ont pas épargné du temps l’irréparable outrage. Deux me viennent à l’esprit : celle qui nous dit, rue Vaillant, qu’ici naquit Jean-Philippe Rameau, et celle, face à l’historique palais de Justice, qui nous rappelle qu’ici naquit Jeanne Fremyot, celle qui devait devenir la sainte baronne Jeanne de Chantal.
Faudra-t-il quémander une augmentation d’un millième d’euro sur ma feuille d’imposition locale pour que les touristes aient enfin sous les yeux des plaques lisibles qui rendront alors certains lieux inoubliables ?
Michel HUVET
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