Nancy Hézard au piano face à ses choristes (Photo X) |
On se frotte les yeux, on n’en croit pas
ses oreilles : voilà un choeur, celui de la Haute Côte-d’Or, qui ne fait rien
comme tous ceux qui se disent que le chant choral c’est d’abord chanter Brel ou
Brassens, qui n’existe que depuis 2008, qui regroupe des amateurs venus de
Châtillon, Montbard, Semur ou Vitteaux, qui ne répète qu’une fois par semaine, et qui se hisse
au sommet de la difficulté musicale !
Nancy Hézard n’y va pas de main lasse : ce
seront Duruflé, Arvo Pärt ou rien ! De quoi former d’abord, sinon la justesse absolue,
du moins l’écoute des plus fins accords désaccordés, sinon la justesse de
l’intention cachée au coeur de partitions délicates, très subtiles dans leur
écriture et très inspirées en matière de spiritualité.
Le Choeur de Haute-Côte-d’Or ainsi vêtu de
prétention, l’a justifiée l’autre soir dans l’église Saint-Germain de Vitteaux
devant un public médusé, qui ne s’attendait pas à découvrir comment un basque
contemporain comme Javier Busto parvient, à partir de murmures et chuchotis, à traduire “le plus grand des mystères” (O magnum mysterium) en
conduisant l’auditeur jusqu’à la lumière irradiante d’un grandiose alleluiah.
C’est vrai que l’ambition de Nancy Hezard
est atteinte : elle a visé la Lune, elle y parvient ! Certes, elle ne pose pas
son aéronef choral sur le satellite, mais elle s’en approche très près, le
contourne et le valorise. C’est d’autant plus vrai avec Arvo Pärt, cet Estonien
qui dépasse le sérialisme et le collage de ses débuts pour parvenir, notamment
dans un Magnificat à couper le souffle et surtout dans un Nunc Dimitis qu’on
eut aimé réentendre en bis, à faire sentir à l’auditeur l’ampleur du spectre
lumineusement sonore qui s’inscruste en mille couleurs dans son âme.
Pour que les choristes parviennent à voir
la Lune, Nancy Hezard calme les tempi et laisse passer des transitions
hasardeuses, mais c’est pour la bonne cause, celle qui réconcilie musiques savante
et populaire.
Michel HUVET